Colonie correctionnelle d’Eysses et Prison de la Petite Roquette
L’une des plus grandes réformes concernant les prisons fut mise en place sous la Monarchie de Juillet, notamment à cause du taux de criminalité grandissant et le taux de récidive le plus élevé d’Europe. Cette réforme concerne le système pénitentiaire tout entier et vise à l’hygiénisation des prisons. Attrapez votre trousseau de clé, mettez votre gilet pare balle et plongez au coeur d’une prison en 1830 afin de comprendre la réfome si importante qui se produisit.
Une réforme imaginée dès 1819
L’impulsion à l’origine de cette réforme pénitentiaire de grande ampleur provient d’une société royale qui s’est constituée afin de se pencher sur cette question de l’état des prisons. Une société royale qui réunit les personnages les plus importants et puissants s’interroge donc sur les prisons, le meilleur mode de détention à adopter et les conditions d’hygiène entre autres. De plus, des prisons sortirent de terre un peu partout en France comme la prison de la Petite Roquette dont Charles X était le commanditaire.
Au lendemain des Trois Glorieuses, quelques éminents juristes comme Charles Lucas et Alexis de Tocqueville vont donner une nouvelle impulsion à cette réforme pénitentiaire. Charles Lucas, jurisconsulte et nouvellement désigné inspecteur général des prisons, prépare et présente une pétition à la Chambre des députés rassemblant deux grands projets : une importante réforme pénitentiaire ainsi que l’abolition de la peine de mort. Il voit la détention comme un moyen de corriger le comportement du détenu en vue de sa remise en liberté. Alexis de Tocqueville est également un juriste de formation et désormais célèbre philosophe français qui a contribué de manière très importante à cette réforme des geôles de France. En effet, Alexis de Tocqueville fut chargé par la France en 1830 d’aller étudier le système pénitentiaire américain qui lui, était efficace. A l’issue de ces premières investigations aux Etats-Unis, il rédige un ouvrage Le système pénitentiaire aux États-Unis et de son application en France (1833) qui lui confère le rang de « premier pénitencier de l’univers », c’est à dire qu’il voit le système pénitentiaire comme salutaire et bénéfique, notamment en comparaison avec la peine de mort.
Auburniens versus pennsylvanians
Alexis de Tocqueville, outre-Atlantique, voit se confronter deux systèmes pénitentiaires : celui adopté par la prison d’Auburn dans laquelle les détenus vivent en communauté mais doivent observer un silence strict et celui de Pennsylvanie ou les détenus vivent et travaillent dans leur cellule, en isolement constant. Quand Alexis de Tocqueville revient en France et fait part au ministère et aux réformateurs, il présente et explique les avantages et inconvénients des deux systèmes américains et l’on est tenté de croire que le choix par la France du système à adopter était seulement à faire entre ces deux modèles mais il n’en est rien. Charles Lucas par exemple n’est convaincu par aucun de ces systèmes. Il juge l’isolement constant mis en place par le système pennsylvanien inhumain et le silence permanent du modèle d’Auburn comme trop dur à supporter pour les détenus. Doctrines, idées et philosophie s’affrontent. Face à Charles Lucas qui imagine l’institution pénitentiaire comme étant une étape de correction dans le but de remise en liberté se heurte aux idées défendues par Tocqueville qui pense que la prison doit être un passage rude et désagréable.
La Petite Roquette : prison parisienne aux allures américaines
C’est dans le 11ème arrondissement de Paris que la Grande et la Petite Roquette virent le jour en 1825. Ces deux établissements pénitentiaires ont vu le jour sous l’impulsion de Charles X afin d’enfermer les prisonniers condamnés au bagne et les condamnés à mort. L’architecture de la prison et le système pénitentiaire adopté sont souvent étroitement lié et c’est particulièrement le cas par rapport à l’établissement de la Petite Roquette. Lebas, l’architecte, conçoit cette prison à la manière des établissements pennsylvaniens. Il s’agit d’une prison dite « panoptique ». Le plan panoptique, mis en lumière par Jeremy Bentham, comprend une tour centrale de surveillance autour de laquelle sont placés les cellules des détenus. La surveillance est donc maximale et les détenus sont isolés. La Petite Roquette est démolie en 1974 en raison des conditions de détention inhumaines qui suscite l’indignation de tous.
Pour aller plus loin :
Par Colombe Cissé pour Héritages
Bonjour à toute l’équipe et bravo pour votre belle initiative ! C’est avec intérêt que j’ai lu votre article sur la réforme du système carcéral de 1830 et vous pourrez me compter parmi vos lectrices. je n’ai pas voulu souligner en commentaire public (c’eût été vilain de ma part, mais en privé, je peux me le permettre avec bienveillance) mais j’ai relevé une petite erreur d’orthographe dans votre texte. Un gilet pare-balles (du verbe parer qui signifie arrêter) et non par balles. Recevez mes encouragements à poursuivre dans votre entreprise qui est excellente !