Comme toujours lors de l’annonce d’un nouvel événement chez Héritages, l’effervescence gagne les cœurs et les esprits, d’autant plus lorsque le domaine de Chaalis est présenté comme notre futur scène, un mélange d’impatience et d’impression s’est fait ressentir. L’honneur pour nous est grand, et il nous incombe d’être à la hauteur de l’Institut de France qui nous accueille lors des Journées du Patrimoine 2022 pour un weekend de visites théâtralisées et costumées au temps de Nélie Jacquemart-André. Quel entrain pour nos acteurs au moment de se retrouver le samedi matin devant les grilles du domaine qui renferment neuf siècles d’histoire. Faute de coulisses, ils auront à leur disposition les jardins et les intérieurs de l’abbaye cistercienne pour répéter et patienter entre les visites. L’association a en effet pu représenter une vingtaine de fois son parcours de visite du jardin au rez-de-chaussée richement décoré par sa dernière propriétaire.
Nélie Jacquemart emportée par sa passion des arts acheta le domaine en 1902, huit ans après la mort de son mari, le banquier Edouard André. Elle écrit : « J’espère que j’aurai Chaalis, c’est mon plus vif désir ». Elle fit du domaine en plus de son hôtel particulier de Paris une galerie d’art à part entière où se toisent les Giotto, Boucher et autres chefs d’œuvre de toutes les époques. Son éclectisme allié à un goût certain meubla le domaine de plus de 6000 œuvres dont 4000 exposées autour desquelles nous avons pu jouer. La famille Murat et les moines précèdent Nélie dans la lignée des grands propriétaires du lieu et ajoutent à l’aura du lieu.
Les évènements théâtralisés deviennent des activités récurrentes pour l’association, mais l’adaptation au lieu est chaque fois particulière : pour la première fois nous voilà plongés à la Belle Epoque, dans les fastes des mondanités de Nélie et du tout Paris. Les visiteurs côtoient la famille d’Orléans, des grands mondains comme Monsieur de Fouquières ou encore les riches industriels comme Marie Say. Qu’il est plaisant et quelle joie pour les acteurs de voir les sourires des visiteurs émerveillés par les drapés des robes et les discrètes conversations au coin d’une pièce, les confidences de Nélie sur ses derniers achats. Les visites étaient sublimées par le lieu, surtout au sein de la Galerie des Bustes où les jeux de lumière et d’ombres faisaient danser les statues et les costumes tout au long de la journée. La pierre épurée et brute des voutes jouxte la finesse de la sculpture des bustes, le vestibule Médicis et ses tapisseries et fait résonner les voix pour les déposer dans les mémoires de chacun.
Car s’il est un but que tous nourrissent lors de ces visites théâtralisés c’est bien celui-ci : marquer les cœurs et les mémoires des visiteurs, que chacun prenne conscience de la vie passée dans les lieux d’histoire et combien la mémoire est essentielle. Nous construisons notre mémoire et espérons nous inscrire dans un mouvement qui nous dépasse : celui d’une Histoire commune à tous et autour de laquelle nous pouvons nous rassembler, nous unir. Voilà ce qui tient à cœur à chacun des membres, transmettre car nous avons tant à recevoir de ces personnages et de ces lieux qui nous inspirent.
Chacun au sein de l’association s’engage dans ces évènements pour garantir l’immersion, le spectacle et le frisson que procure une demande en mariage revécu un siècle plus tard. Les photographes s’allient aux vidéastes, aux rédacteurs et aux acteurs pour sublimer un écrin qui ne demande qu’à être visité. Notre patrimoine et notre histoire sont si riches que nous ne saurions rester immobiles, impuissants face à l’engagement qu’il demande. Il est trop beau ne serait-ce que de valser dans la Galerie des Bustes pour comprendre le potentiel et tout ce que contient le domaine. Il suffit de se mettre à l’écoute de l’histoire, d’essayer de comprendre son essence pour que viennent à notre imagination les images d’un passé que nous faisons vivre.
Alban LAMY