Comme vous l’avez compris grâce à nos derniers articles (à lire ici), la guerre de Cent Ans n’est pas une guerre continue, mais bien une succession de rencontres armées, séparées de trêves plus ou moins guerrières. Ce long conflit, d’origine féodale deviendra par la suite un conflit entre les nations. Il transformera durablement la France.
Un conflit féodal
Depuis le IXe siècle, les relations entre les hommes sont régies par les règles précises de la féodalité. Cette structure politique et sociale de la société s’organise autour de services et d’hommages rendus à un seigneur en échange d’un fief (un territoire ou une somme d’argent). En bref, celui qui accepte le fief devient le vassal de son seigneur. Il doit lui rendre hommage, et conclut un pacte de non-agression et d’alliance.
Sachant cela, les historiens ont constaté que la guerre de Cent Ans avait pour origine un conflit féodal. En effet, en 1337, le roi d’Angleterre Edouard III (1327-1377) est le vassal du roi de France Philippe VI (1328-1350) pour le territoire de la Guyenne, selon le traité de Paris de 1259 conclu entre Louis IX et Henri III. Mais ce traité est boiteux car il repose sur un compromis, et plus précisément sur des renonciations qui n’ont jamais été signées. Si cette solution bancale a été viable pendant le règne des deux rois, Louis IX et Henri III, c’est parce qu’ils avaient de réelles relations d’amitié.
Cependant, ce qui valut pour eux deux, ne fut pas le cas pour leurs descendants. A leur mort, il était trop simple de se perdre en arguties pour justifier des actes d’intimidation de part et d’autre des frontières de la Guyenne. C’est donc bien avant le début de la guerre de Cent Ans, que commencèrent les affrontements entre pro-anglais et pro-français sur ce territoire.
En fait, en dehors des règles strictes de la féodalité qui ne sont plus respectées par personne, le cadre féodal est une excellente manière de justifier des actes guerriers. Il donne une solidité juridique et morale à la fois à Philippe VI et Edouard III.
Des enjeux territoriaux très précis : la Guyenne pomme de discorde entre les souverains
La Guerre de Cent Ans a une origine féodale car le fief de Guyenne est revendiqué à la fois par les Anglais et les Français.
Philippe VI veut reprendre ce territoire et justifie ses actes par le fait que le roi d’Angleterre se dérobe à deux obligations féodales : d’abord, il refuse un hommage à son suzerain, le roi de France lui-même. Ensuite, ce dernier rappelle que les fameuses renonciations du traité de Paris n’ont jamais été signées. De plus, l’enjeux derrière la reconquête du territoire de la Guyenne est économique. C’est une terre riche, avec des vignobles réputés, et un accès à la façade atlantique. Bordeaux est une ville importante du réseau commercial anglais en plus des villes de Flandre. Pour schématiser : Bordeaux (vins), Londres (centre d’import-export) et la façade des villes flamandes (laine et draps flamands) forment un tissu d’échanges économiques très serré. Le roi de France louche donc sur toutes ces possibilités.
De son côté, Edouard III veut se proclamer roi de France, pour bloquer les revendications de Philippe VI et garder la riche Guyenne. Ce territoire est donc la pomme de discorde qui provoque la guerre de Cent Ans et ses combats aux multiples facettes : institutionnels, juridiques, moraux et guerriers.
Pour aller plus loin : Pour les historiens en herbe La Guerre de Cent ans L’Angleterre et la France en guerre. 1300-1450 de Christopher Allmand chez Point Histoire. En image : « Qu’est ce que la féodalité » https://www.youtube.com/watch?v=ruafbpgtwKk
Agnès Dirat