L’art va rester présent tout au long de la Première Guerre mondiale. Même si l’on retrouve une vision héroïque qui encourage les soldats, beaucoup d’artistes vont proposer une tout autre image. Certains d’entre eux vont être les premiers à s’engager et vont vouloir transmettre un témoignage. En effet, les artistes vont, par le biais de l’art, raconter ce qu’ils voient en passant de l’horreur des tranchées au retour des soldats chez eux. Au lendemain de la guerre, les artistes cherchent à modifier leurs touches et à dénoncer l’horreur de la guerre en s’éloignant pour cela de plus en plus de la recherche de l’esthétisme.
Les artistes vont se voir confier une tâche importante, montrer une image positive de la guerre en l’honneur des soldats sur le front ainsi que pour motiver les hommes à s’engager. On peut s’attarder sur l’œuvre de Maurice Denis, une Soirée calme en première ligne, peint en 1917. Denis se rend sur le front en 1917 pour réaliser des tableaux à la demande de l’État-major. Pour ce travail, il s’intéresse non pas à représenter l’action de la guerre, mais plutôt le quotidien des soldats. On voit ici des soldats effectuant diverses actions comme des constructions en bois, ou aller chercher de l’eau ou encore un qui prend le temps de lire une lettre. C’est une représentation étrange de la guerre que nous offre l’artiste en présentant es soldats ici dans un climat qui semble calme, une tranquillité accentuée par la douceur des aplats de couleur dans un jeu de contraste entre le décor rouge et l’uniforme vert-bleu des soldats.Â
La guerre va être un déclencheur de progrès technique, notamment en terme d’armement. Ces nouvelles armes de guerre vont être une source d’inspiration pour certains artistes. On peut penser à l’œuvre Bursting Shell (explosions d’obus) par Christopher Richard Wynne Nevinson réalisé en 1915, Royaume-Uni, Londres, Tate Collection L’artiste représente ici l’idée même de l’explosion d’obus par le biais de formes géométriques et la vitesse par les petites touches de couleurs blanches au centre de l’œuvre, pouvant nous faire penser aux œuvres futuristes, très utilisé à ce moment là . En effet, les artistes futuristes cherchent à travers leurs toiles à rejeter la tradition esthétique pour montrer le monde moderne. Pour cela, il s’appuie en particulier sur les machines et la vitesse.
De plus, on retrouve également un art dit “art des tranchées†ou “art du Poiluâ€, cet art consiste à utiliser des objets du quotidien d’un soldat pour réaliser son Å“uvre et s’occuper lors des attentes dans les tranchées. Par exemple une douille martelée et gravée de roses dans une douille d’obus de 75 mm, 1917, pas d’auteurs identifiés. Beaucoup de soldats vont s’intéresser à cet art, en prenant parfois des risques afin de récupérer des objets, c’était également un moyen de gagner de l’argent puisque l’on retrouve un véritable marché de l’art autour de ces objets.
À la différence de Maurice Denis, d’autres artistes ne vont pas hésiter à montrer l’horreur de la guerre. C’est le cas d’Otto Dix dans son œuvre La Guerre, un triptyque datant de 1929, conservé à Dresde, Staatliche Kunstsammlungen, Gemäldegalerie Neue Meister. Il représente de manière réaliste plusieurs scènes dans la vie d’un soldat en mettant en avant une seule finalité, celle de la mort. Le tableau commence avec le panneau gauche, montrant des soldats en marche vers un paysage brumeux, annonçant ainsi le chaos à venir. Puis le panneau central, le plus grand qui représente ici le chaos du champ de bataille, mélangeant ainsi les soldats vivants et combattant avec les cadavres en décomposition. Le panneau de droite, représente les soldats blessé et témoins de cette guerre, on y retrouve un autoportrait d’Otto Dix comme pour nous montrer lui-même sa propre blessure. Pour finir, la prédelle qui forme comme un cercueil contenant ici les corps des soldats. Dix cherche ici à transmettre une émotion intense au spectateur sur l’atrocité de la guerre.
La guerre est avant tout un sujet autour de l’homme, l’homme qui part s’engager pour défendre son pays, chose que l’on retrouve chez de nombreux artistes. Certains artistes prometteurs vont malheureusement décéder sur les champs de bataille comme Franz Marc, connu notamment pour ses représentations de chevaux bleus. D’autres aux contraires ne vont pas pouvoir s’engager, mais vont faire de la peinture leur arme. C’est par exemple le cas d’Henri Matisse. On retrouve diverses correspondances montrant la culpabilité de celui ci de ne pas être sur le champ de bataille avec les autres. « Derain, Braque, Camoin, Puy sont au front risquant leur peau. […] Comment pourrions-nous servir le pays ? » « En continuant comme vous le faites, à bien peindre. » Correspondance entre Marcel Sembat et Henri Matisse ou encore, « Là je travaille énormément toute la journée, et avec ardeur, je sais qu’il n’y a que ça de bon et de sûr. Je ne puis faire de politique, comme hélas, presque tout le monde en fait, aussi pour compenser, il faut des toiles fermes et sensibles. ». Il ne se sent donc pas autorisé à représenter les scènes de la guerre, mais il va par exemple représenter son fils, engagé dans la cavalerie dans le tableau le violoniste à la fenêtre, 1918, Centre Pompidou. Il représente ici son fils, qui joue du violon en tenue militaire.
L’homme va être assimilé comme une machine de guerre, accentuant ainsi sur l’idée de déshumanisation et de violence. Otto Dix va vouloir transmettre les séquelles de la guerre, on le voit dans son tableau les joueurs de skat, Ici une scène banale d’une partie de carte populaire en Allemagne, trois hommes sont représentés, on devine qu’il s’agit de soldat par la croix de fer du joueur en bleu, il s’agit la d’une décoration militaire. L’artiste met en scène « les gueules cassées », des soldats vivants, mais abîmés par la violence de la guerre que l’on essaye de réparer, en poussant les mutilations jusqu’au grotesque en rapprochant les gueules cassées à des marionnettes mécaniques.
Fernand Léger s’intéresse lui aussi à cette représentation de l’homme comme machine dans La Partie de cartes de 1917 conservé à Otterlo, musée Kröller-Müller. Il va lui aussi être mobilisé comme soldat. Il symbolise les soldats comme des robots avec des formes cylindriques et une couleur de métal faisant écho au monde des machines. Rien ne les identifie mis à part les grades et les décorations sur leurs uniformes. L’artiste dira que Verdun était « l’académie du cubisme » : « Il n’y a pas plus cubiste qu’une guerre comme celle-là qui te divise plus ou moins proprement un bonhomme en plusieurs morceaux et qui l’envoie aux quatre points cardinaux »
En résumé :
Pour aller plus loin :
Par Faustine Landier