Si le destin de Napoléon est plutôt atypique, celui de ses frères et sœurs n’en est pas moins rocambolesque. Loin d’être enfant unique, Napoléon voit le jour dans une famille de l’élite locale qui vit naître neuf autres enfants qui atteignirent l’âge adulte.
Son père, Charles Bonaparte, est un juriste corse exerçant dans la juridiction d’Ajaccio, lui-même descendant d’une famille de notables dont certains personnages furent des hommes politiques de Corse. La mère de Napoléon, Letizia Ramolino, descend de militaires de haut rang ainsi que de politiques italiens. Dès leur jeune âge, les liens familiaux de la fratrie des Bonaparte furent très forts et lorsque Napoléon prend le pouvoir en France, celui-ci installe son sang sur les plus hauts trônes d’Europe. Si la raison est d’abord familiale, l’objectif du Consul puis de l’Empereur est de limiter les luttes de pouvoir. En plaçant ses frères et sœurs à de hautes fonctions, Napoléon se prive de potentiels concurrents qui voudraient s’opposer à lui, voire le renverser. Les Bonaparte savent très bien que sans Napoléon, ils ne sont plus rien. Ainsi, leur fidélité à leur frère est incontestable. Mais la fratrie Bonaparte sert d’outils à celui qui devient Empereur des Français en 1804 pour dominer l’Europe.
Dès le début de son ascension, Napoléon a besoin d’un homme loyal sur lequel il peut compter dans les difficultés de sa légitimation en France, surtout après une période bien troublée que fut la Révolution française. Il place ainsi son jeune frère Lucien Bonaparte, ancien député de la Corse, à la tête du Ministère de l’Intérieur en décembre 1799. Quelques mois plus tôt, celui-ci avait déjà reçu la fonction de Président du Conseil des Cinq-Cents, qu’il conserve malgré sa nouvelle fonction de ministre de l’Intérieur. Les sœurs Bonaparte ne sont pas en reste. Élisa reçoit le duché de Toscane en 1809. Dans l’impossibilité de recevoir des fonctions politiques, les autres sœurs Bonaparte épousent des hommes ayant de hautes fonctions. Quant à Pauline et Caroline, les deux dernières filles Bonaparte deviennent par leur mariage des princesses italiennes. Mais certains se voient accéder à des titulatures prestigieuses en recevant des mains de leur frère des couronnes royales.
Louis Bonaparte, souverain de la Hollande (1806-1810)
Depuis la Révolution française, la Hollande est sous tutelle de la France. La nouvelle République batave créée en 1795, bien qu’officiellement indépendante, reste sous le joug français. En 1806, Napoléon s’accapare le territoire et y place son petit frère Louis Bonaparte. La République protestante est remplacée par une monarchie catholique. Mais la gestion de la Hollande par le nouveau roi est telle qu’elle n’oppose aucune contestation. Très vite, Louis Ierse révèle proche de son peuple, impliqué dans les affaires de l’État. Ainsi trouve-t-il l’attachement des Hollandais. Mais sous tutelle de Napoléon, Louis Ierse voit reprocher de penser aux intérêts de la Hollande avant les intérêts de la France. Malgré les relations coupées avec les Britanniques par le blocus continentale, Napoléon impose la conscription en Hollande afin d’augmenter les contingents français, ce que Louis refuse. En 1809, voyant qu’il perd son influence sur son frère, Napoléon contraint Louis à donner une partie de son royaume à la France. Enfin, en 1810, l’Empereur fait pression sur le souverain de la Hollande afin de récupérer l’autre partie. Louis Ier est contraint d’abdiquer et s’exile en Autriche. Le territoire hollandais est définitivement annexé par la France.
Jérôme Bonaparte en Westphalie (1807-1813)
Au lendemain de la Révolution française, le Saint-Empire Romain Germanique est fragilisé par les nombreuses guerres contre la France. En 1805, Napoléon concentre ses efforts sur l’est. La victoire d’Austerlitz la même année provoque l’effondrement de l’Empire germanique millénaire. L’Empereur français fonde la Confédération du Rhin afin d’organiser les états germaniques. Pour renforcer son pouvoir, Napoléon nomme son jeune frère Jérôme comme étant le roi du tout nouveau royaume de la Confédération du Rhin : le royaume de Westphalie. En Westphalie, Jérôme est lui aussi sous la surveillance de son frère Napoléon et ce dernier veille à l’importation du système politique français dans cette région allemande. Durant toutes ses années de pouvoir, Jérôme se maintient au pouvoir et ne rencontre pas véritablement d’opposition. En 1812, il participe avec l’Empereur à la campagne de Russie mais sont vaincus en 1812. L’Empire commence à fondre, les Russes prennent la capitale, Cassel, en septembre 1813. Jérôme abdique en octobre de la même année, et s’exile en France puis en Italie.
Joseph Bonaparte, roi d’Espagne (1808-1813)
Après la défaite de l’Espagne face aux armées françaises au printemps 1808, Napoléon I contraint le roi d’Espagne Charles IV à abdiquer et à son fils Ferdinand à renoncer à la Couronne espagnole. Le 4 juin 1808, Napoléon place son frère aîné Joseph sur le trône d’Espagne. Celui qui devient José Ierd’Espagne rencontre de grandes difficultés à affermir sa légitimité. En effet, les Espagnols voient en Joseph l’ennemi français qui, après avoir conquis l’Espagne dans le sang et renversé leur roi, est très contesté. Pour se rendre populaire, il abolit l’impôt sur l’alcool mais cette mansuétude lui vaut le surnom de Pepe botella(Pépé la bouteille). Partout, les tensions se transforment en véritable rébellion. Le danger est si important que Joseph Ierdoit fuir Madrid en juillet 1808. Les insurgés proclament Ferdinand VII roi d’Espagne. Il faut attendre le début de l’année 1809 pour que Joseph soit réinstallé sur le trône d’Espagne par son frère Napoléon qui réprime la révolte par les armes. À partir de ces évènements, Joseph sait qu’il a besoin de rester sous la tutelle de son frère afin de maintenir son pouvoir en Espagne, celui-ci commandant lui-même les maréchaux et les armées dans la péninsule ibérique. En 1812, les Anglais débarquent en Espagne afin de libérer le territoire espagnol du joug français. Après plus d’une année de guerre entre les Anglais et les insurgés espagnols contre les Français, ces derniers sont contraints de se retirer de la péninsule ibérique. Le 11 décembre 1813, Napoléon signe le traité de Valençay qui destitue son frère Joseph et reconnaît Ferdinand de Bourbon roi d’Espagne. Après un règne tourmenté et privé de ses pouvoirs par son frère, Joseph Bonaparte s’exile en Suisse, puis aux États-Unis.
La fratrie Bonaparte
- Joseph (1768-1844)
- Napoléon (1769-1821)
- Lucien (1775-1840)
- Élisa (1777-1820)
- Louis (1778-1846)
- Pauline (1780-1825)
- Caroline (1782-1839)
- Jérôme (1784-1860)
Bibliographie
LENTZ (Thierry), Le congrès de Vienne : une refondation de l’Europe. 1814-1815, Paris, Perrin, 2013
LENTZ (Thierry), Nouvelle histoire du Premier Empire, tome 1. Napoléon et la conquête de l’Europe. 1804-1810, Paris, Fayard, 2002.
TULARD (Jean), La France de la Révolution et de l’Empire, Paris, Presses Universitaires de France, 1995.
TULARD (Jean), L’Europe au temps de Napoléon, Paris, Cerf, 2020.
Pour aller plus loin :
Par Emilien Vaille pour Héritages